[Impacts en série] Régulièrement, 100 Transitions mettra en avant l’un des membres du Collège des directeurs de développement durable (C3D). Épisode 1 : Régis Castagné, directeur général d’Equinix, leader mondial des data centers.

Pouvez-vous présenter Equinix ?

Supports de l’ensemble de nos interactions digitales et dématérialisées, dissimulés derrière ce Cloud évanescent, les data centers sont le hardware qui rend tout cela possible. C’est précisément le métier d’Equinix. Nous sommes l’hôtel informatique qui garantit l’accessibilité et la sécurité des données, mais aussi l’autoroute qui va leur permettre de communiquer entre elles. Nous hébergeons au même endroit des leaders du cloud, mais également les opérateurs de Saas ou de services.

Quels sont les défis spécifiques à votre activité, en matière de transition écologique ?

Une grande partie de l’effort à fournir se situe sur le scope 3, c’est-à-dire sur nos émissions indirectes : l’extraction des matières premières nécessaires à la fabrication de nos data centers, par exemple. Cela représente près de 80% de notre empreinte environnementale. C’est un sujet complexe, que l’on ne maîtrise pas toujours directement, mais sur lequel, en tant que leader de notre marché et grand donneur d’ordre, nous avons une responsabilité particulière pour embarquer toute notre chaîne de valeur vers des pratiques plus durables. Nous y travaillons activement. Le reste de nos émissions est lié à la consommation d’électricité et aux besoins en refroidissement de nos centres. Nous mettons en œuvre toute une série d’actions pour les réduire. Au-delà de techniques d’optimisation du refroidissement, ou de la souscription à des contrats d’énergies renouvelables pour 96% de notre parc, nous innovons pour récupérer la chaleur émise par nos serveurs. Ainsi, cette chaleur jusqu’ici perdue servira prochainement à chauffer une piscine olympique ainsi que des logements en Seine-Saint-Denis. Nous sommes également le premier opérateur de data centers à avoir changé ses normes de fonctionnement au niveau de la température. L’énergie représente notre premier poste de dépense. Au-delà de l’esprit de responsabilité, il est dans notre intérêt économique bien compris de déployer des solutions pour réduire notre consommation.

"La RSE est un sujet qui doit traverser toute l’entreprise, tous les collaborateurs, toutes les fonctions. Il n’y a qu’un directeur général qui peut avoir cette vision-là."

On oppose souvent tech et low tech pour répondre au défi climatique ? Quelle est votre position ?

C’est une opposition que me semble un peu binaire. Je pense qu’il y a encore trop d’incertitudes et pas assez d’études poussées pour évaluer précisément l’impact global du numérique, que ce soit sur les émissions de l’ensemble de sa chaîne de production, ou sur celles qu’il permet d’éviter : le déplacement non effectué grâce à une réunion en visioconférence, par exemple. J’ai bien sûr, par mon métier, foi en l’IT, même si je sais que celle-ci ne suffira pas à elle seule à nous sauver. Elle peut cependant se réformer : depuis 2019, nous avons diminué notre impact carbone de 23%, tout en multipliant par six notre activité. C’est la preuve qu’une action résolue peut générer des résultats.

Justement vous portez vous-même, en tant que directeur général, les sujets RSE. Pour quelles raisons ?

C’est un sujet qui doit traverser toute l’entreprise, tous les collaborateurs, toutes les fonctions. Il n’y a qu’un directeur général qui peut avoir cette vision-là. D’autant que c’est un enjeu business fondamental, sur lequel nos clients nous attendent. Je parlais de notre scope 3 tout à l’heure. Eh bien nous sommes le scope 3 de nos clients, qui prennent eux aussi des engagements de plus en plus contraignants et sont donc toujours plus attentifs à ces enjeux dans le choix de leurs prestataires. Enfin, il y a le vent réglementaire qui se lève, incarné notamment par taxonomie européenne, et qui nous oblige à des transformations systémiques. En tant que dirigeants d’entreprises, nous avons un devoir d’exemplarité.

Propos recueillis par Antoine Morlighem

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