La start-up, spécialisée dans la livraison de produits consignés, vient de lever dix millions d'euros. Objectifs ? Améliorer la rentabilité de ses infrastructures et proposer de nouveaux produits. Son cofondateur et CEO Charles Christory revient sur l’ambition qu’il porte depuis deux ans et demi.

Pourquoi avoir cofondé Le Fourgon ?

Je suis entrepreneur depuis quinze ans. Auparavant j’avais monté une entreprise, vendue en 2010 à Webedia, spécialisée dans le marketing digital. Nous aidions les marques à performer par le jeu. Il me manquait cette notion d’impact et de sens. J’ai eu une prise de conscience progressive. Alors que la planète se réchauffe, les deux autres fondateurs du Fourgon Stéphane Dessein, Maxime Tharin et moi nous demandions ce que nous allions laisser aux générations d’après. Plutôt que de lancer de gros projets nous nous sommes attaqués à des sujets du quotidien. Quand on boit une bouteille, on la jette ensuite à la poubelle alors qu’on met nos assiettes dans une machine à laver. Or le nettoyage consomme beaucoup moins d’eau et d’énergie que la production d’emballages. En France, chaque année, 100 milliards d’emballages sont utilisés et les microplastiques ont un impact néfaste avéré sur la santé.

Les start-up dans la RSE ont tendance à disrupter des secteurs. Vous, vous remettez la consigne au goût du jour. Pourquoi ?

Malheureusement je pense qu’on se fourvoie en essayant d’innover de façon totalement disruptive pour sauver la planète. On veut construire des avions verts et remplacer les véhicules thermiques par des électriques afin de préserver des emplois et les moyens de transport. C’est bien, mais on devrait allouer davantage de moyens pour que les gens utilisent le vélo, qui existait avant la voiture. Il faut revenir au bon sens paysan. Ce n’est pas l’intelligence artificielle qui sauvera la planète. Mettre des millions sur la table pour améliorer le tri des déchets, car seulement 26 % des plastiques sont vraiment recyclés, est une bonne idée. Mais c’est la dernière étape. Nous avons oublié l’étape intermédiaire, notamment à cause de la pression de certains lobbys : le remploi. Nos impôts paient le cycle des déchets mais pas le cycle du réemploi.

"Plutôt que de lancer de gros projets nous nous sommes attaqués à des sujets du quotidien"

Comment fonctionnez-vous ?

Nous livrons entre 700 et 800 types de produits consignés. Cela va de la limonade à la bière en passant par le lait et le liquide vaisselle. Nous nous développons aussi dans le shampoing, le dentifrice, les gels douche ou encore les bocaux de légumes et les compotes. Nous proposons des prix qui sont bons pour le client, le producteur et nous. Les produits sont issus majoritairement de producteurs locaux. Il est beaucoup plus simple de commander sur notre site que sur un drive classique, la livraison est gratuite à partir de 20 euros et peut se faire dans la journée. Les emballages consignés sont récupérés lors de la commande suivante et peuvent être réutilisés jusqu’à 40 fois.

Vous venez de lever 10 millions d’euros dans un contexte de marché difficile. Avez-vous eu du mal à convaincre ?

Oui et non. Dix millions, c’est une belle somme par les temps qui courent. Toutefois, nous avons rencontré beaucoup de fonds à impact pour qui le premier critère est économique. Ils préfèrent faire cent fois leur mise voire tout perdre que d’aller sur des business qui proposent un retour sur investissement de 4 à 10. Nous, nous sommes dans l’infrastructure. Nous avons construit dix-neuf sites logistiques. Un seul est rentable pour le moment, les autres vont le devenir. En deux ans et demi nous avons recruté 300 personnes. Même si nos chiffres vont dans le bon sens, cela coûte de l’argent. Les investisseurs penchent pour des boîtes avec 100 % de marge brute. Mais on ne sauvera pas l’humanité uniquement avec des SAS. Les citoyens l’ont bien compris. Cette année nous avons aussi lancé une levée de fonds participative et récolté 3 millions d’euros en 21 jours. Pour la dernière levée, nous avons été soutenus par des business angels, souvent avec leur propre argent mais aussi par la holding d’un gros groupe, id4 Ventures, Teampact Ventures et le fonds La Poste Ventures.

Qu’allez-vous faire de cet argent ?

Financer les infrastructures et aider nos entrepôts à aller vers la rentabilité. Nous voulons aussi accélérer dans l’alimentaire, l’hygiène, la beauté et la maison. Il y a encore trois zones où nous ne sommes pas présents : le Sud, l’Île-de-France et la Normandie. Nous avons évidemment vocation à y aller, mais d’abord nous devons améliorer tout notre squelette en montant d’un cran dans le digital, le management et le marketing.

Propos recueillis par Olivia Vignaud

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