Alors que le Salon de l’agriculture bat son plein sur fond d’enjeux économiques et écologiques chaque jour plus pressants, focus sur Hectar : un laboratoire de solutions pour la transition agricole.
Lancé en 2019 par Audrey Bourolleau, ancienne conseillère agriculture, pêche, forêt et développement rural d’Emmanuel Macron et Xavier Niel, Hectar a pour vocation d’apporter de la connaissance et de la reconnaissance aux métiers agricoles. Véritable écosystème, il rassemble : un campus de formation, des espaces de recherche et d’expérimentation, un accélérateur de startups, des espaces de séminaires et pédagogiques ainsi qu’une grande ferme dédiée à l’agriculture régénératrice. Un lieu unique, qui veut faire face aux multiples enjeux auxquels fait face un monde agricole où : 160 000 fermes sont à reprendre dans les années à venir, soit un tiers des exploitations du pays, 70 000 postes sont à pourvoir chaque année et qui voit 20% de ses sols souffrir d’érosion. Ayant ouvert ses portes en 2021, en vallée de Chevreuse aux portes de Paris, Hectar veut sensibiliser et former 2 000 personnes par an, tout en favorisant l’émergence de nouvelle solutions écologiques, pratiques et technologiques pour le secteur.
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Tech
Misant sur l’esprit entrepreneurial, le programme de formation d’Hectar fleure bon la start-up nation, avec son lot de pitch, de mentoring et de business plan. L’agriculture ce n’est pas que de la boue, du lisier et des réveils glacés au son du coq dans la brume humide d’un matin d’hiver : ça peut aussi être sexy, tendance, une nouvelle frontière pour les entrepreneurs en herbe. L’accent mis sur les solutions technologiques participe de cette ambiance. Depuis sa création en février 2022, Hectar a échangé avec plus de 900 startups pour en retenir 42, réparties sur 4 promotions, qui bénéficient toutes du programme d’accélération de 2 ans, dont 3 mois intensifs. Premier écosystème Agri et FoodTech en Europe, cet accélérateur s’appuie sur le savoir-faire de son réseau d’agriculteurs, d’investisseurs, d’entrepreneurs et d’experts divers réunissant près de 1 000 personnes. Parmi les start-up accélérées, on peut citer : BeeGuard, un outil de mesure de la biodiversité à partir de la surveillance des abeilles, Voltiris, une solution d’agrivoltaïsme ou encore Horizom : des exploitations de bambous pour décarboner l’économie et produire de la biomasse.
L’objectif : partager les échecs et les réussites pour apprendre, innover et explorer les chemins de transition les plus durables tant au niveau économique, social qu’environnemental.
No Tech
Mais Hectar n’est pas qu’un rêve techno solutionniste. En témoigne la ferme pilote qui cherche à concilier agriculture biologique et limitation du travail du sol pour l’émergence d’une agriculture régénératrice. L’objectif : partager les échecs et les réussites pour apprendre, innover et explorer les chemins de transition les plus durables tant au niveau économique, social qu’environnemental. Pour améliorer la santé des sols, la ferme active plusieurs leviers comme : la remise en place de l’élevage en système herbager et pâturant pour apporter de la résilience et augmenter la fertilité du sol, l’intégration d’arbres agroforestiers pour améliorer la capacité du sol à absorber l’eau ou la mise en place de sols couverts pour fixer l’azote, augmenter la matière organique, rendre les sols plus résilients à la sécheresse et aux inondations et permettre aux micro-organismes de prospérer.
Tic-tac
Suffisant pour dissiper les craintes de ceux qui ne voient en Hectar qu’un avatar 3.0 de la mécanisation agricole, allant à rebours des préceptes de l’agroécologie ou de la permaculture ? Sans doute pas. Mais l’approche pragmatique du projet, contribuant à rendre de nouveau attractifs des métiers aussi essentiels que délaissés mérite, si ce n’est un enthousiasme béat, un intérêt certain dans la discussion qui s’ouvre autour de la question cruciale : quelle agriculture pour atteindre le Net Zéro en 2050 ?
Antoine Morlighem