Il y a encore quelques mois, la Commission de régulation de l’énergie (CRE) tablait sur un gain de 8,9 milliards d’euros pour la puissance publique. Ce sera finalement trois fois plus, avec une estimation révisée à 31 milliards d’euros pour 2022 et 2023. Rentables les énergies renouvelables ? Ça alors !
Les pourfendeurs d’éoliennes ont un argument en moins dans leur besace. Moches ? C’est une affaire de goût. Facteur de stress pour les vaches ? À démontrer. Ce qui ne l’est plus, en revanche, c’est leur rentabilité. En effet, selon la CRE, elles contribuent à elles seules aux deux tiers de cette manne inespérée. Plus loin, c’est l’ensemble du secteur qui s’approche à grands pas du moment symbolique où il aura remboursé la totalité des subventions consenties par l’État.
Contexte favorable
Selon la Commission de régulation de l’énergie "le contexte exceptionnel de crise et, en premier lieu, la hausse significative des prix de gros de l’énergie au cours des derniers mois modifient considérablement les perspectives dévolution de ces charges prévisionnelles". La CRE prévoit, dans les conditions actuelles de prix de gros, que toutes les filières d’énergies renouvelables en métropole continentale représenteront des recettes pour le budget de l’État, pour une contribution cumulée, de 30,9 milliards d'euros au titre de 2022 et 2023. La filière éolienne terrestre contribue majoritairement à cette recette, à hauteur de 21,7 milliards d'euros, la filière photovoltaïque pour 3,5 milliards et la filière hydraulique 1,7 milliard. Celle du biométhane injectée y contribue également pour un montant de 0,9 milliard d'euros. La production prévisionnelle soutenue en 2023 s’établit à 69 TWh d’électricité et 12 TWh d’injection de biométhane.
Manne
Une telle manne devrait encourager le gouvernement à mettre les bouchées doubles, même si elle servira avant tout à compenser en partie le bouclier tarifaire qui devrait peser sur les finances publiques à hauteur de 100 milliards d’euros. La CRE alerte toutefois "sur le phénomène des résiliations anticipées des contrats de soutien par certains producteurs ENR". En effet, elle note qu’en juillet 2022, les demandes identifiées concernaient une puissance installée cumulée de 1,3 GW alors qu’à fin septembre 2022, ce volume dépasse les 3,7 GW. Cela représente une perte considérable pour le budget de l’État, de l’ordre de 6 à 7 milliards d'euros cumulés pour les années 2022 et 2023. "Ces installations n’ont pu être développées que grâce au soutien financier de l’État dont elles ont bénéficié sur des durées généralement supérieures à dix ans. Il est tout à fait anormal que les producteurs concernés sortent des contrats garantis par l’État à quelques années de leur échéance pour profiter des prix de gros élevés. La CRE recommande donc de renforcer la mesure de taxation des rentes infra-marginales prévues par la réglementation européenne pour ces installations", conclut la Commission.
Antoine Morlighem