Des locaux dans le quartier vivant de Saint-Pierre à Paris, une grande verrière, des collaborateurs dont l’âge moyen ne dépasse pas 30 ans, un panier de fruits en libre-service et un employé croisé sur une petite planche de skate… Pas de doute, nous sommes bien dans une start-up. Mais la spécialité d'Ovrsea est bien loin des sujets que l’on a l’habitude de voir disruptés par ce genre d’entreprise. Ici, nous sommes avant tout chez un commissionnaire de transport. C’est-à-dire chez un expert de la logistique, qui organise et exécute des transports de marchandises pour le compte des autres. Un métier méconnu du grand public et qui, de prime abord, peut paraître aride.
Il n’en est rien quand on rencontre Arthur Barillas, l’un des cinq cofondateurs d’Ovrsea, née en 2017, et qui digitalise le secteur. Son credo ? La pédagogie. "C’est une valeur centrale pour nous, qui matérialise la mission de notre entreprise, explique-t-il. Nous devons décrypter des sujets complexes pour aider nos clients à prendre les meilleures décisions sur le transport." Et le diplômé de HEC tient ses promesses en entretien. Son discours est fluide, adapté aux connaissances de son interlocuteur et donne envie de s’intéresser à son métier.
Fidéliser et recruter
Une capacité à transmettre que le tout juste trentenaire cultive. L’entreprise décrypte l’actualité de la logistique à travers une newsletter Le Chargeur, qui "connaît une audience incroyable". Ses équipes, quant à elles, reçoivent toutes les semaines un intervenant extérieur ou interne sur un sujet sans lien avec leur métier, allant du député à l’artisan boucher en passant par le musicien. "Il est important de maintenir l’hygiène d’apprendre, constamment." De quoi fidéliser les collaborateurs (en quatre ans, le turnover d’Ovrsea n’est que de 3 %) et attirer de nouvelles recrues. Une nécessité pour cette entreprise qui compte 90 personnes et souhaite atteindre les 200 d’ici à la fin de l’année en allant chercher des talents dans tous ses corps de métier (digital, commercial, RH, etc.). "Nous avons la chance de recevoir de nombreuses candidatures, ce qui signifie probablement que la culture d'entreprise que nous avons essayé de créer est attrayante", constate le dirigeant qui précise néanmoins que sous son masque se cachent quelques cernes qui en disent long sur le temps que la consolidation de ses ressources humaines lui prend.
"Il est important de maintenir l’hygiène d’apprendre, constamment"
En même temps que le renforcement de ses forces vives, Ovrsea a affermi son financement en s’associant en 2021 à un acteur historique du secteur, le groupe Bolloré, qui a pris une part majoritaire dans la start-up. S’allier à un corporate plutôt que privilégier une levée de fonds ? Question de stratégie. "Nous avons une forte complémentarité. Le groupe Bolloré bénéficie d’un réseau physique unique sur lequel nous pouvons nous appuyer et que nous n’entendons pas développer de notre côté. Il nous permet aussi d'avancer sur des sujets techniques. De notre côté, nous les accompagnons dans leur digitalisation, précise Arthur Barillas. Et nous sommes tous deux des acteurs français. S’allier l’un à l’autre est une bonne chose pour la souveraineté et la capacité du pays à exporter son leadership."
Simplifier
Quelle valeur ajoutée Ovrsea apporte-t-elle au secteur de la logistique ? L’entreprise a créé une plateforme simple et agréable d’utilisation où clients et prospects peuvent connaître en quelques clics le coût de leurs trajets, les moyens de transport à leur disposition, ou encore suivre en temps réel les marchandises. Ovrsea n’oublie pas non plus le volet carbone, précisant l’impact CO2 de chaque mission et propose des alternatives au transport aérien. La plateforme est sans cesse mise à jour pour être toujours au plus près des besoins de clients qui, certes, avaient déjà l’habitude de faire appel à des intermédiaires, mais manquaient clairement de visibilité sur les acheminements.
Car la chaîne d’interlocuteurs dans la logistique peut-être très longue. Et le métier de commissionnaire de transport est réglementé, passage par les douanes oblige. C’est pourquoi Arthur Barillas a obtenu le diplôme nécessaire afin d’asseoir sa légitimité. Résultat ? Un peu plus de 700 clients conquis dans 60 pays et des marques telles que Sezane, Nuxe, Devialet ou Christofle dans son portefeuille, aux côtés de nombreuses autres PME et ETI françaises. Avec la crise, les consommateurs se tournent davantage vers des produits pour la maison, ce qui a créé une tension supplémentaire sur des chaînes de logistique déjà éprouvées par les confinements. Ouvrant un boulevard à Ovrsea qui a multiplié par quatre son chiffre d’affaires en 2021 et devrait continuer sur le chemin de l’hyper-croissance encore longtemps.
Olivia Vignaud